PFAS : stratégie pour préserver la santé publique et l’environnement

Le Ministre de la Santé et de l’Environnement, Yves COPPIETERS poursuit et amplifie les actions prises par la Wallonie pour gérer la présence de PFAS dans l’environnement, conformément aux engagements pris dans la Déclaration de Politique Régionale (DPR). La Région adopte une approche ambitieuse et rigoureuse dans la gestion de ces polluants éternels, alliant protection de la santé publique, préservation de l’environnement, et développement économique durable. Le Ministre s’engage à renforcer la réglementation environnementale tout en soutenant l’innovation dans les secteurs économiques.

Pour rappel, fin 2023, face aux expositions détectées chez les habitants de plusieurs zones de Wallonie et des dépassements de la future norme de concentration des PFAS dans les eaux de distribution, un plan d’actions a été lancé afin de mettre en œuvre les initiatives suivantes : monitoring environnemental dans les zones prioritaires (ZIP), identification des zones à risques, biomonitoring sanguin et mise en place d’un Conseil scientifique indépendant.

RESUMÉ

Parmi les mesures proposées par le Ministre, figurent l’adoption immédiate de la norme européenne de 0,1 μg/l pour les PFAS dans les eaux de distribution, la mise en place de valeurs seuils temporaires pour les boues d’épuration et la surveillance des émissions atmosphériques. Par ailleurs, une campagne de mesures des rejets industriels sera organisée avec le secteur. En parallèle, des prélèvements sanguins sont relancés pour les populations exposées, notamment dans les zones à risque, avec un suivi médical et psychosocial renforcé. Les agriculteurs bénéficient également d’un programme spécifique de biomonitoring. La Wallonie s’engage également dans la recherche de solutions durables et soutient des projets innovants (recherche d’alternatives aux PFAS, recherche sur les voies de transfert,…).. Soit :

  • Accord pour avancer l’entrée en vigueur de la norme prévue pour 2026 pour les eaux de distribution
  • Introduction de valeurs seuils temporaires pour les boues et rejets des stations d’épuration (STEP)
  • Mesures des rejets industriels en coopération avec les entreprises
  • Intégration des spécificités wallonnes dans le cadre européen
  • Biomonitoring : transparence des informations et relance de prélèvements
  • Suivi médical et psychosocial renforcés
  • Denrées alimentaires : coopération avec l’AFSCA
  • Innover et soutenir la recherche : développer des solutions durables face aux PFAS – Communication : une information transparente et continue pour les citoyens
  • Communication : une information transparente et continue pour les citoyens

Mesures environnementales : une réponse renforcée aux enjeux PFAS

Afin de protéger l’environnement et de limiter l’exposition aux PFAS, la Wallonie met en place un ensemble de mesures immédiates et ambitieuses :

1. Accord pour avancer la norme prévue pour 2026 pour les eaux de distribution

La Wallonie s’accorde pour adopter dans les prochaines semaines l’application de la norme de 0,1 μg/l pour la somme de 20 PFAS dans les eaux de distribution, prévue par la Directive européenne 2020/2184. Initialement, cette norme devait entrer en vigueur au 1er janvier 2026. Cependant, pour garantir la sécurité immédiate des citoyens, le Gouvernement wallon l’applique sans attendre. Cette anticipation est rendue possible grâce à la coopération avec l’ensemble des producteurs et distributeurs d’eau potable.

À ce jour, plus aucun dépassement de cette norme n’est constaté dans les eaux de distribution en Wallonie, grâce à un monitoring étendu sur l’ensemble des ressources en eau potable. Ce monitoring se poursuivra jusqu’en 2025, avec une surveillance accrue des zones à risque identifiées. En complément, une valeur cible supplémentaire de 4 ng/l pour les 4 PFAS les plus dangereux (notamment le PFOS et le PFOA) sera introduite d’ici 2028, conformément aux recommandations de l’Autorité Européenne de Sécurité des Aliments (EFSA).

Concernant le TFA (acide trifluoroacétique), le plus petit des PFAS, bien qu’à l’heure actuelle, la toxicité du TFA est considérée comme très faible, un monitoring coordonné par la SWDE est en cours et une note spécifique sera proposée au Gouvernement wallon dans les prochaines semaines.

2. Introduction de valeurs seuils temporaires pour les boues et rejets des stations d’épuration (STEP)

Les boues issues des stations d’épuration constituent un risque de contamination par les PFAS lorsqu’elles sont utilisées comme fertilisants en agriculture. Sur base d’une recommandation du SPW ARNE, le Gouvernement wallon a donc établi une valeur cible temporaire de 40 μg/kg MS pour 6 PFAS dans les boues d’épuration (PFOS, PFOA, PFNA, PFHxS, PFHxA et le PFDA = 4 PFAS les plus dangereux, ainsi que 2 fréquemment rencontrés dans les boues et dont la toxicité est élevée) et 400 μg/kg MS (somme des 22 PFAS) pour une dose maximale d’épandage de 2 t MS/ha et par an et ce, de manière transitoire. Il est proposé qu’une évaluation de la pertinence de ces valeurs cibles soit réalisée si possible fin 2025 et au plus tard fin 2026.

Les valeurs cibles actuellement proposées permettent d’éviter l’arrêt immédiat de la valorisation agricole des boues de nombreuses stations d’épuration et à la SPGE d’élaborer progressivement, et dans un délai raisonnable, des pistes alternatives durables pour la gestion des boues urbaines, en tenant compte notamment des capacités d’accueil limitées des filières de traitement wallonnes.

Le Ministre a par ailleurs sollicité la Société publique de gestion de l’eau (SPGE) pour que l’Office international de l’Eau (OiEau) réalise une étude de benchmarking scientifique sur les normes à appliquer en PFAS dans les boues d’épuration, cette étude sera validée par le CSI. Il est également décidé de surveiller à long terme, les PFAS dans les eaux usées de STEP, à partir de 2025.

 

3. Mesures des rejets industriels en coopération avec les entreprises

 

Le secteur industriel constitue une source de diffusion de PFAS, notamment via les rejets d’eaux usées et les émissions atmosphériques. Le Gouvernement wallon lancera donc une campagne de caractérisation des rejets industriels, visant à mesurer la présence des 28 PFAS les plus préoccupants dans les rejets d’eaux usées industrielles. Cette campagne sera menée en collaboration avec les entreprises, selon un protocole défini, incluant des analyses régulières.

L’objectif de cette campagne est de développer des valeurs limites d’émission (VLE) pour les industries susceptibles de rejeter des PFAS, notamment dans les secteurs du traitement des déchets, de la chimie et de la métallurgie. En parallèle, une étude exploratoire sur les émissions atmosphériques de PFAS sera menée conjointement par l’AWAC et l’ISSeP, pour définir des normes de surveillance de l’air. Les résultats de ces campagnes permettront d’adopter un arrêté gouvernemental fixant les normes d’émission de PFAS pour les installations industrielles, et de réviser les conditions des permis d’exploitation si nécessaire.

4. Intégration des spécificités wallonnes dans le cadre européen

La Wallonie, en tant que région pionnière dans la gestion des PFAS, s’engage à défendre ses spécificités environnementales dans les discussions européennes sur la révision des directives concernant les boues d’épuration et les eaux souterraines. Ces directives, actuellement en cours de révision, devront tenir compte des études menées en Wallonie, qui ont permis de mettre en lumière les niveaux de contamination dans diverses matrices environnementales (eaux, sols, rejets industriels, boues). En outre, la Wallonie peut se prévaloir d’un paysage entrepreneurial fort lié à l’économie circulaire, des ressources naturelles en eau potable exceptionnelles et enfin une sensibilisation citoyenne importante aux enjeux de santé environnementale. Cet ensemble doit être préservé.

Les discussions autour de la révision de la Directive 86/278/CEE sur la protection de l’environnement et de la Directive 2006/118/CE sur la protection des eaux souterraines se poursuivent, et la Wallonie y participe activement. La Wallonie s’assurera que ses spécificités locales soient prises en compte dans ces discussions.

De même, le SPW participe aux travaux du Comité REACH belge qui, entre autres, soutient la proposition d’interdiction universelle des PFAS (hors usages essentiels). Deux points d’attention seront pris en compte, concernant l’évaluation des impacts sur le secteur industriel et la promotion de l’innovation pour extraire le PFAS des processus industriels. La position de la Wallonie s’alignera aux travaux européens de la nouvelle Commission.

Mesures sanitaires : garantir la santé et le bien-être des citoyens exposés

Le Conseil Scientifique Indépendant (CSI) indique qu’il est difficile, avec les connaissances actuelles, de relier les taux de PFAS dans le sang à des risques précis pour la santé humaine, en particulier pour les composés moins étudiés. Cependant, en parallèle des actions environnementales, la Wallonie met en place des mesures ambitieuses pour protéger la santé des populations exposées aux PFAS.

1. Biomonitoring : transparence des informations et relance de prélèvements

Les premiers résultats des zones de Chièvres et Ronquières ont révélé une surimprégnation en PFAS dans le sang de certaines personnes. Les résultats pour la zone de Nandrin étaient en cours de restitution. Des erreurs ont toutefois été constatées dans les résultats d’analyses, c’est pourquoi il a été décidé de proposer aux personnes des communes concernées d’effectuer de nouveaux prélèvements dans le cadre des biomonitorings.

En conséquence, des rencontres citoyennes seront organisées dans les prochaines semaines, afin d’informer la population de ce qui s’est passé et de replanifier les campagnes de prélèvements. Les campagnes de prélèvements pourront commencer ensuite et les nouvelles valeurs de dosages des PFAS être communiquées au plus vite à chaque participant.

Il est important de préciser la différence entre un « biomonitoring », lorsqu’il s’agit de réaliser l’étude d’une population (définie, sur un territoire) et de ses habitudes de vie ; et un « dépistage », lorsqu’il s’agit de réaliser une mesure du taux de PFAS dans le sang pour un individu.

2. Suivi médical et psychosocial

Le Gouvernement wallon, en collaboration avec l’AViQ, a mis en place un dispositif de suivi psychosocial pour accompagner les citoyens impactés par la contamination aux PFAS. Ce suivi inclut une aide psychologique assurée par des professionnels, notamment dans les zones de Chièvres où des signes d’anxiété accrue ont été observés lors des réunions d’information publique.

Le Gouvernement wallon sollicitera le Ministre fédéral de la Santé pour questionner le CSS (Conseil Supérieur de la Santé), afin d’élaborer pour les professionnels de la santé des recommandations de bonnes pratiques pour le suivi et la prise en charge des personnes surexposées y compris pour les femmes enceintes ou allaitantes. Il s’agira de définir des modalités de prise en charge médicales des populations surexposées.

Le Ministre de la Santé collaborera avec le Ministre fédéral de la Santé afin d’identifier des besoins de recherche scientifique en matière de santé pour les personnes surexposées à soutenir par les autorités sanitaires.

 

3. Biomonitoring des agriculteurs : un programme spécifique

Les agriculteurs, qui peuvent être exposés aux PFAS via l’utilisation de certains pesticides, font l’objet d’un biomonitoring spécifique lancé dans le cadre du Programme Wallon de Réduction des Pesticides (PWRP3). Ce programme vise à mesurer l’exposition des agriculteurs et à évaluer les risques sanitaires associés à leur activité professionnelle.

Ce biomonitoring est mené par l’ISSeP et repose sur l’analyse d’échantillons d’urine prélevés chez les agriculteurs, avec un focus sur les PFAS à courte chaîne présents dans les pesticides utilisés en Wallonie.

La révision du règlement REACH servira de base pour l’orientation des actions relatives à une meilleure définition des enjeux de santé et sécurité au travail liés à l’exposition à ces substances et notamment pour prendre des mesures de gestion et poursuivre les travaux réglementaires.

4. Denrées alimentaires : coopération avec l’AFSCA

Il est prévu de travailler conjointement avec le gouvernement fédéral pour coordonner la surveillance des denrées alimentaires. L’AFSCA est compétente pour les denrées alimentaires mises sur le marché, mais lorsqu’il s’agit de denrées auto-produites, et auto-consommées, la compétence revient à la Région wallonne. Il est prévu en phase 3 de chaque monitoring environnemental organisé dans les ZIP (zones prioritaires) de procéder aux mesures dans ces produits. L’administration wallonne est chargée de s’assurer de la cohérence des travaux à entreprendre avec l’AFSCA dans les zones potentiellement impactées par les PFAS.

5. Innover et soutenir la recherche : développer des solutions durables face aux PFAS

Le Gouvernement wallon s’engage à soutenir la recherche scientifique pour identifier des solutions durables aux problèmes posés par les PFAS. Cela inclut la recherche sur les alternatives aux PFAS dans les processus industriels et agricoles, les techniques de réduction des rejets, les voies de transfert de ces molécules dans l’environnement et vers les humains.

Le Ministre de l’Environnement travaillera en collaboration avec le Ministre de la Recherche et les ministres en charge des différentes matières pour proposer des projets de recherche concernant les PFAS.

 

6. Communication : une information transparente et continue pour les citoyens

Une communication transparente avec les citoyens est essentielle pour garantir la confiance du public dans les actions mises en place. Le Conseil Scientifique Indépendant a élaboré un vade-mecum pour améliorer la communication des résultats des biomonitorings et des mesures environnementales. Des rencontres citoyennes seront organisées dans les zones touchées pour informer les habitants des résultats et des actions prévues.

À travers ces mesures, la Wallonie se positionne comme un acteur majeur dans la lutte contre les polluants émergents, en adoptant une approche intégrée et proactive. Le concept « One Health », qui relie la santé humaine, animale et environnementale, guide cette politique, permettant de garantir un avenir sain et durable pour tous les citoyens.