Il n’y a pas de microclimat à Ellezelles

70 communes belges sont dirigées par un ou une bourgmestre Engagé·e. Ce mois-ci, on vous fait découvrir Ellezelles, le village des sorcières.

Il n’y a pas de microclimat à Ellezelles. En hiver, le ciel y est bas et gris comme partout ailleurs dans le royaume. Les monts du Pays des Collines y enserrent une place de village où on retrouve quelques commerces, une brasserie et, bien sûr, La Mairie, le bistrot local.

Assise à une table, la patronne nous regarde entrer en épluchant ses légumes pendant que , sur son écran plat, Michel Berger cherche à nous convaincre qu’on est resté dans les années 80. Au centre du troquet, un poêle à bois brûle à toute berzingue et réchauffe nos doigts recroquevillés sur une Quintine, le magique breuvage qui est brassé à quelques hectomètres de là.

Quintine, c’est la sorcière qui s’affiche sur l’étiquette de la bouteille. « Pour l’ouvrir comme un Ellezellois, tu places tes deux pouces comme ça, nous montre notre guide. Et surtout, il faut que ça fasse du bruit quand ça s’ouvre ! » Pop ! Notre acclimatation se passe bien.

Ellezelles Village Des Sorcieres

Notre guide, c’est Alexandre Boitte, le bourgmestre fraîchement élu de la petite commune de 6.000 habitants.

Prof la moitié du temps, il consacre le reste de sa semaine à faire tourner la boutique ellezelloise. « C’est presque du 24 heures sur 24, confie-t-il, sourire au coin des lèvres. On a des activités tous les week-ends. Ça n’arrête jamais. Faut pas venir ici pour se reposer vous savez. Et en tant que bourgmestre, évidemment, on est attendu à chaque événement. »

C’est sur le Sentier de l’Étrange que notre visite débute. Les pieds dans la gadoue, on patauge plus qu’on avance. Mais Alexandre a l’avantage de jouer à domicile. « En bon rural que je suis, j’ai toujours une paire de bottines dans le coffre. » Malin ! Le long du chemin, diables, monstres et sorcières nous guettent, attendant que l’un d’entre nous s’étale au milieu des prés

Les sorcières, elles sont au cœur du folklore local. « Tout ça vient d’un procès pour sorcellerie qui s’est tenu ici au XVIIe siècle », raconte le bourgmestre. Quintine, toujours elle, y fut condamnée au bûcher avec 4 autres femmes. Et depuis les années 70, chaque dernier samedi du mois de juin, elles reviennent hanter Ellezelles pour leur sabbat.

« Cet imaginaire, on le doit à un artiste local, Jacques Vandewattyne. Mais désormais, la population s’en est emparé pour le vivre collectivement. C’est le folklore et c’est très important ici. »

Sur la colline d’en face trône le moulin du Cat sauvage. « Qu’on va bientôt rénover d’ailleurs ». Avec ses majestueuses ailes de bois et sa meule en pierre du pays, il rappelle qu’on est au cœur de la ruralité.

« Aujourd’hui, on a encore 80 agriculteurs sur le territoire et c’est important de les aider. » La commune vient d’ailleurs de déployer une série de visuels qu’elle installe un peu partout pour rappeler et revendiquer le caractère agricole de la région. «Quand quelqu’un vient s’installer ici à la campagne, il doit en prendre les avantages et les inconvénients. »

– Ah, le v’là, mon ami Cédric…

– Bonjour, m’sieur l’maïeur !

Cédric, c’est Cédric de Taeye, le chocolatier du village. « Mais attention, précise-t-il tout de suite. Ici, on fonctionne à l’ancienne. On ne se contente pas de travailler le chocolat : on le fabrique à partir de la fève de cacao. » On a goûté. On a fondu de plaisir. Diabolique !

Développer l’économie locale, c’est une priorité pour Alexandre Boitte. « Si on veut que les gens restent à Ellezelles, il leur faut du travail. On ne veut pas d’un village dortoir. On a donc des ateliers ruraux et la commune a aussi mis en place une agence de développement local.»

Ellezelle Sorciere

Il est temps pour nous de laisser Alexandre retourner à ses affaires. « J’ai une réunion puis faut que je me change, pour un mariage. » Ah oui, ben, n’oublie pas d’enlever les bottines, alors! Doucement, on va s’arracher tant bien que mal à l’ensorcellement qu’exerce ce village sur nous. Mais pas sans passer saluer une dernière fois Quintine à La Mairie. Pop !

Le reportage en vidéo